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3 mars 2008 1 03 /03 /mars /2008 10:04

Les élections qui viennent de se dérouler en Russie permettent de comprendre le nouveau visage de ce pays. Ce n’est plus l’état post-communiste en ruine du passé, mais une puissance nouvelle qui veut jouer jeu égal face à l’U.E. , la Chine ou les Etats-Unis et où le concept de démocratie reste une notion toute relative.

 

poutine_medvedev200.jpgLes résultats donnent donc une écrasante majorité pour Dimitri Medvedev candidat du parti « Russie Unie » de Vladimir Poutine. 70% des suffrages environ, dans une élection où le taux de participation, 65 %, a été élevé. Une élection « à la russe » avec son lot d’irrégularités et d’observateurs internationaux refoulés des bureaux de votes.

 

Des élections pleinement démocratiques sont quelque chose que les russes n’ont jamais vraiment connu. Après l'empire tsariste, puis l'ére soviétique, l'arrivée de la démocratie s'est faite difficilement. Les scrutins sous Eltsine puis Poutine ont toujours été entachés de soupçons d'irrégularités. Même si on n’en est plus au bon vieux temps du Parti unique, le personnel politique russe, Poutine en tête,  a été formé à l’école communiste.  Il y a bien des opposants, mais ils ont connu toute une batterie d’intimidations pour réduire au maximum leur influence. Rappelons nous Gary Kasparov, l’un des principaux opposants, arrêté pour trouble à l’ordre public peu de temps avant les élections législatives et empéché de se présenter à la présidence.

 

Medvedev sous l'oeil attentif de Poutine



« Russie Unie», le parti vainqueur, n’a plus besoin du goulag. Les régimes autoritaires savent se montrer plus subtils.  Le parti de Poutine contrôle la quasi-totalité des médias autorisés (notamment les 3 chaînes de télé diffusées sur l’ensemble du territoire) et en province, ses représentants font la pluie et le beau temps pour l’attribution des aides et des subventions. De plus, après quelques entourloupes juridiques, seuls 3 autres candidats avaient été autorisés. 2 « épouvantails » (un ultranationaliste et un communiste nostalgique) destinés à rendre le candidat Medvedev plus respectable et un inconnu, plus démocrate, mais que l'on n’a pu voir quasiment nulle part dans les médias.

force-en-presence.jpg

Le parlement russe depuis les dernières élections de 2007, pas d'opposition à craindre...

 

Et surtout aux yeux des Russes, Poutine sort avec un excellent bilan. L’économie russe, même si elle reste gangrenée par la corruption a parfaitement profité du boum du pétrole et du gaz, et l’aisance économique revient. Malgré les inégalités, le salaire moyen ne cesse d’augmenter. Il a aussi parfaitement su jouer sur le nationalisme de ses concitoyens et a montré une très grande fermeté dans les crises intérieures notamment en Tchétchénie. Tenant tête aux projets d’expansion de l’OTAN, n’hésitant pas à intervenir dans les affaires intérieures de l’Ukraine ou de la Georgie, défendant les intérêts des frères slaves Serbes au Kosovo, il donne l’impression aux Russes que leur pays redevient une puissance majeure.

 

Dimitri Medvedev est élu. Mais Vladimir Poutine n’est pas loin. Après deux mandats, en effet, la constitution lui interdisait de se présenter une troisième fois. Mais à 56 ans, il n’est pas décidé à prendre sa retraite. D’où un étonnant tour de passe-passe constitutionnel. Il a mis en avant le peu connu Dimitri Medvedev pour lui succéder et a annoncé qu’il envisageait sérieusement de devenir premier ministre sous sa présidence. Une manière comme une autre de garder solidement les rênes du pouvoir. Déjà, le nouveau président russe élu, a promis lundi matin un "partenariat amical" avec le président sortant, Vladimir Poutine. Malgré le changement, rien ne change…


Le nouveau président incarne le visage de la Russie de ce début de XXIème siècle et bénéficie pour l’instant d’un à priori favorable de la plupart des gouvernements occidentaux. Medvedev est considéré par beaucoup d’observateurs comme un personnage un peu terne. C'est un économiste de 42 ans, donc trop jeune pour avoir véritablement fait carrière dans l’appareil communiste soviétique disparu en 1991. Né à Saint-Petersbourg comme Poutine, proche de ce dernier sans jamais avoir fait de mandat politique, c’était jusqu’à présent un conseiller économique restant dans l’ombre. Il est surtout connu pour avoir dirigé le géant du gaz Gazprom, la plus grosse compagnie russe et la troisième entreprise énergétique mondiale. Un poste stratégique tant l’énergie est devenue l’arme économique principale de la Russie. C’est Poutine qui, il y a trois mois l’a propulsé sur le devant de la scène, au grand dam d’autres collaborateurs de Vladimir, peut-être trop ambitieux aux yeux du patron et qui guignaient le poste. La lutte pour le pouvoir entre les autres amis de Poutine pourrait donner lieu à quelques surprises à l'avenir. 

undefinedMais attention tout de même, lorsqu’au milieu des années 90, Vladimir Poutine a été choisi par Boris Eltsine, le premier président élu de la Russie post-communiste, pour lui succéder, tout le monde le décrivait comme un personnage secondaire et effacé. Une fois au pouvoir, celui-ci s’est affirmé comme le chef sans partage du pays. Contrairement à Poutine, ancien du KGB qui n’a jamais coupé les ponts avec les méthodes autoritaires, Medvedev incarne la nouvelle génération de russes post-soviétiques. Un technicien plus à l’aise avec les bilans comptables qu’avec les fiches de police et parfaitement au courant des subtilités du monde polissé de l’économie internationale. Le pouvoir étant ce qu’il est, il serait étonnant qu’il ne reste qu’un second couteau dans l’ombre de Vladimir Poutine… Mais ça, l’avenir nous le dira.

 
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