Après une longue bataille judiciaire entre les associations de défense de l’environnement et le chantier naval d’Alang, le plus grand chantier naval du monde, basé dans l’état du Gujarat, à l’ouest de l’Inde, et spécialisé dans le démantèlement des navires, la justice indienne a donné le 11 septembre son accord pour le désossage du paquebot Blue Lady, ex Norway, ex France. Un ouvrier sur six qui travaillent au démantèlement de navires sur le chantier naval indien d'Alang est victime d'empoisonnement par l'amiante, affirment certains experts. Mais le chantier naval est le poumon économique de cette région avec ses 10 milliards d’euros de bénéfices. Et certains responsables indiens s’inquiètent de voir son activité de démolition jadis florissante remise en cause au nom des règles de sécurité occidentales qui n’ont pas cours chez eux. On estime que le navire doit contenir près de 3000 tonnes d’amiante matériau largement utilisé à l’époque pour l’ignifuger et dont on a découvert depuis qu’il est fortement cancérigène.
Un reportage (en norvégien, mais les images parlent d'elles mêmes) sur l'arrivée du navire à Alang
Ouvert en 1983, Alang a longtemps été le plus grand cimetière de bateaux du monde. Malgré la dureté du travail, les risques (372 morts par accidents depuis son ouverture), et les conditions de vie précaires dans les cabanes qui servent de logement, les ouvriers affluent. Ce sont, pour la plupart, des paysans sans terre qui voient là une opportunité de toucher de bons salaires dans une région ravagée par le chômage. Beaucoup d'O.N.G écologistes militent pour sa fermeture estimant que l'Inde n'a pas à devenir le dépotoir des pays occidentaux. Ce qui n'a pas été sans entraîner des heurts avec certains mouvements ouvriers qui pensent d'abord à la sauvegarde des emplois.
L’arrivée de ce bateau est symbolique en effet, lancé en 1960 pour relier Le Havre à New York le paquebot France, le plus long et le plus luxueux du monde à son époque, était devenu pour notre pays le symbole de sa prospérité et de son prestige mondial pendant les années 60. Mais la mode des voyages en paquebots pour traverser l’Atlantique périclita dans les années 70. Devenu trop onéreuse, l’exploitation fut arrêtée en 74. Le navire fut revendu en 79 à une compagnie norvégienne qui le rebaptisa Norway et en fit non plus un paquebot de grand luxe pour une clientèle haut de gamme, mais un navire de croisière grand public dans les Caraïbes. Signe des temps la compagnie norvégienne exploitant le paquebot est racheté en 2001 par une compagnie malaise. Après l’explosion d’une de ses chaudières en 2003 (7 morts) le bateau, renommé Blue Lady, jugé trop vieux, est désarmé et revendu à l’Inde pour le désossage…
Un site de passionné sur le France qui permet de revoir le paquebot dans ses heures de gloire.