Nous avons beaucoup insisté sur ce type particulier de document tant en cours que sur le blog. Il est temps de faire le point sur l’image de propagande, un des supports documentaires privilégiés de l’épreuve d’histoire.
Les enfants du Fleuve Jaune (peinture chinoise des années 40)
Mao Ze Dong montre l'avenir forcément glorieux à une jeunesse belle et vive
La propagande tout d’abord : qu’est ce que c’est ? Il s’agit d’une technique de communication pour influencer et agir sur une opinion publique, modifier son comportement pour lui faire adopter un état d’esprit ou un comportement particulier. C’est ce qu’on pourrait simplifier sous le terme de « publicité politique »
Sous forme d’image, elle doit être simple, percutante et aller à l’essentiel : Pas de discours complexes ou subtils. On doit séduire, frapper les esprits et désigner les bons et les méchants.
Les grands principes (tels qu’ils sont définis par Jean-Marie Domenach dans « la propagande politique » en 1950)
La simplification : une formule, un mot d’ordre, des symboles simples et immédiatement reconnaissables.
L’ennemi : forcément grotesque et/ou maléfique. L’idéal est de se présenter comme une victime, c’est toujours l’autre qui attaque.
Le grossissement : la magnification ou la défiguration : on accentue, on déforme. Les méchants seront forcément ignobles et laids, les gentils beaux et grandioses.
L’orchestration : on répète inlassablement la même idée jusqu’à ce qu’elle apparaisse comme une évidence. Tous les supports (image, cinéma, chanson, manifestation sportive) peuvent être l’occasion de faire passer l’idée.
La transfusion : on se sert de vieux mythes, de symboles patriotiques, de héros du passé pour s’inscrire dans la durée.
Viol rouge ! Ca pourrait se passer ici!
Un pulp, roman bon marché américain des années 50 imaginant l'invasion des Etats Unis par les "Ivan" des soviétiques qui terrorisent la population. Un soldat soviétique au visage hideux (je concéde que le dessinateur étant assez médiocre, même le héros et la fille sont très laids) est abattu par un héros vif comme l'éclair dont les vétements couleur sable et le blouson de cuir rappellent l'uniforme des pilotes de l'armée américaine. Le soviétique est un sadique débraillé qui fouette une blonde et innocente victime. Le sous-entendu est évident : les "commies" (surnom américain des communistes) sont les agents d'un régime policier et arbitraire. Notez enfin le fond rouge sang, la couleur du drapeau de l'URSS.
La lecture d’image de façon générale nécessite de se poser la question suivante : comment celle–ci est elle construite ?
Bien sûr chaque image a ses spécificités et il n’y a pas de façon unique de les analyser.
Découpez l’image en plans. Regardez ou se croisent les lignes de fuite du document, c’est généralement là que se porte le regard donc c’est souvent là que se trouve ce qui doit dominer dans l’image.
Le premier plan est généralement le plus important, ce qui doit ressortir, ce qui doit accrocher le regard.
L’arrière plan plante le décor et peut permettre de glisser quelques détails supplémentaires.
Nous voulons la paix!
Une affiche soviétique de 1946 qui paradoxalement inverse premier et deuxième plans. L'ouvrier soviétique en salopette de travail, beau mais grave, tient un drapeau rouge, symbole du communisme, où est inscrit le slogan. Son poing s'abat sur une table où des leaders du camp occidental (on reconnait de face Truman (le 2ème à partir de la gauche), Churchill (le 3ème) et De Gaulle (le 5ème), sont dessinés de façon caricaturale et en noir et blanc. Sur la table, des armes miniatures, symbole du militarisme et de l'impérialisme du camp d'en face. Remarquez la dynamique du regard de l'ouvrier qui forme une diagonale centrale avec son poing et qui donne toute sa force à l'ensemble.
Un grand classique est l’image en opposition avec le bon et le méchant clairement opposés. Voici un exemple issu de l’imagerie soviétique
affiche soviétique de 1955 :
en haut : "Deux mondes-deux résultats"
"Les résultats de la production industrielle dans les Etats du camp socialiste et dans les Etats du camp capitaliste"
Sur la locomotive est écrit : "les pays du camp socialiste"
en dessous le long de la flèche noire : " les pays du camp capitaliste"
La locomotive rouge (couleur du communisme) symbolise le progrès et l'industrialisation rapide du pays (mais celle-ci part de tellement bas que forcément les chiffres apparaissent spectaculaires) là où le camp occidental, dont l'indice de production passe pourtant de 100 à 176, est représenté en gris morose et semble progresser péniblement comme sur une tortue. Un camp occidental representé par deux capitalistes grotesques en costume et chapeau haut de forme et mené par un militaire signifiant l'impérialisme américain.
Dites vous bien que la plupart du temps le choix des couleurs ou des symboles ne doit rien au hasard. Voici quelques symboliques « classiques » au XXème siècle
Couleurs :
Le rouge = communisme / le sang
Le vert = islam /écologie
Le bleu = la France / L’Union Européenne
Le blanc= la paix / le christianisme (c’est la couleur du pape)
Le noir = le mal / le fascisme italien
Le brun = le nazisme
Animaux :
La pieuvre/l’araignée = le mal tentaculaire
Le serpent = la traîtrise
La colombe = la paix
Le vautour / la chauve souris vampire = les profiteurs
Le mouton/l'agneau =la foule idiote/ la victime
Des animaux peuvent symboliser des pays :
Le coq =La France
L’aigle =les Etats-Unis/ L’Allemagne/la Pologne
L’ours=la Russie
Le lion=La Grande Bretagne
Le dragon/le panda =la Chine
Le tigre/l’éléphant=l’Inde
Dans la même famille d’image on peut la regrouper avec la publicité, la caricature et l’affiche politique. Une photo, soigneusement cadrée et composée peut facilement être utilisée comme une image de propagande, nous en reparlerons.
Allez, je lance de nouveau un petit concours d'interprétation autour de cette image réservée à mes TL et mes TS. A la clef, une (bonne) note d'exercice sur 10 pour celui ou celle qui dans chaque classe m'enverra avant le jeudi 22 novembre la meilleure interprétation possible de cette affiche de propagande. Pas d'indication de source ou d'auteur pour vous aider, si ce n'est que nous avons déjà vu "Paix et liberté" en cours.
P.S. Evidemment Armand comme tu as déjà brillament répondu à celle sur Staline et que tu as obtenu un 10/10 pour cela, tu es hors concours !
(source « un siècle de propagande par l’image » de Patrick Mougenet / documents :site de Bernard Collet)