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2 mai 2008 5 02 /05 /mai /2008 18:04

" Œil pour œil rend le monde entier aveugle. "

 

Mohandas Gandhi, père spirituel de l’indépendance indienne et fondateur du concept de non-violence en politique. Il illustre à merveille les difficultés rencontrées par ceux qui vont essayer  de secouer le joug colonial pour finir assassiné, non par les britanniques, mais par un hindouiste.

Les Indes sont en effet la perle de l’empire britannique depuis sa conquête progressive tout au long au XIXème siècle. C’est un territoire immense morcelé en un tas de principautés en principe semi-indépendante sous l’autorité anglaise et c’est surtout une mosaïque de peuples, de langues et de religions.

Il naît dans une famille de la caste des marchands,  l'une plus haute de la très rigide et inégalitaire société indienne où votre naissance détermine souvent vos possibilités d’évolution sociale. Etant issu d’une famille très pieuse, la religion fera toujours partie de sa philosophie. Il est en effet élevé dans une foi hindouiste très forte et très traditionaliste (bien que très tolérante envers les autres formes religieuses indiennes), tournée vers le respect de toute forme de vie et l'obéissance à une morale religieuse très forte. Il est aussi marié par sa famille à 13 ans à Kasturba, fille de bonne famille du même âge…

Comme beaucoup de futurs leaders indépendantistes, il est issu d’une famille aisée qui travaille avec les britanniques. Ce qui lui permet d’avoir accès à un privilège fort rare pour les populations indienne : des études en Angleterre pour devenir avocat à l'University College de Londres. Il y fait de bonnes études, s’y occidentalise tout en fréquentant des cercles étudiants philosophiques qui lui font prendre conscience des différences entre les grands principes du droit qu’il apprend et la réalité de la vie dans son Inde natale. Il s’intéresse aussi aux autres religions, christianisme, islam et approfondi sa connaissance de l’hindouisme.

 

Reçu comme avocat, il part pour l’Afrique du Sud défendre les intérêts d’une entreprise indienne sur place. Là, choqué par la violence du racisme dans ce pays où la discrimination raciale est dans la loi, il prend fait et cause pour les travailleurs indiens exploités dans les champs et dans les mines d’Afrique australe. Il va y rester vingt ans, de 1894 à 1914 et réussir à obtenir la reconnaissance des droits des travailleurs indiens, non sans problème puisqu’il échappe de peu à un lynchage en 1904 et fait plusieurs séjours en prison.

C’est là qu’il va développer ses méthodes non violentes pour parvenir à ses fins. Abandonnant ses vêtements occidentaux, il va se raser la tête, porter le sari traditionnel et chose inouïe pour un membre d'une haute caste, travailler de ses mains et faire lui même les taches les plus dégradantes comme nettoyer ses toilettes ce qui était réservé aux basses castes considérées comme impures comme les intouchables, véritables parias de la société indienne.  Il va pouvoir essayer de les appliquer dans son pays une fois rentré en Inde. Il s’engage dans la vie politique au sein du parti du congrès et sa personnalité atypique va lui permettre de voir son audience et ses partisans grandir malgré la prison qui l’accueille régulièrement quand il s’oppose aux volontés britanniques. A ses côtés s’engage Jawaharlal Nehru est l'autre figure de l'indépendance de l'Inde. Très tôt engagé dans le Parti du Congrès aux côtés de Gandhi,  il restera un très proche collaborateur malgré les divergences profondes qui les séparaient.

Sa force c’est la désobéissance civile. Un refus systématique mais non-violent de se plier aux règles du colonisateur britannique par des grèves régulières, des manifestations de masse spectaculaires ou profitant du nombre croissant de ses sympathisants, il bloque les rues lorsque des milliers d’indiens se couchent par terre en signe de protestation.

 

Il sait parfaitement jouer de l’intérêt croissant que lui portent le médias du monde entier. La vision de cet homme frêle et souriant qui vit en ascète  dans son ashram (ferme collective) se révoltant pacifiquement contre l’autorité anglaise lui vaut l’écoute des journaux et la venue de partisans du monde entier. Il ne manque jamais de donner un écho médiatique à toutes ses actions accroissant leur effet. Il va ainsi faire un voyage à Londres en 1931, où devant tous les photographes, il rencontre le roi, toujours habillé en sari traditionnel et où il va voir les ouvriers des usines de textile anglaises pour leur expliquer que le boycott n’est pas dirigé contre eux.


La marche du sel.


Il appelle au boycott des produits anglais, encourageant par l’exemple chaque indien à produire ses aliments et ses vêtements lui même sans les acheter dans les boutiques du colonisateur.

En 1930, Gandhi lance une « Marche du sel », vers les marais salants de Jabalpur, en effet, le gouvernement britannique détient le monopole du sel qui lui rapporte une petite fortune utilisée pour l'entretien des troupes chargées de maintenir l'ordre en Inde. Malgré l’interdiction du pouvoir colonial, il récolte du sel sur la plage, puis s’empare pacifiquement des dépôts de sel du gouvernement anglais. Tout au long de la marche, Gandhi diffuse une liste de règles religieuses du comportement non-violent qui sont scrupuleusement respectées. Les manifestants sont frappés ou arrêtés, mais devant leur absence de réaction, la volonté répressive s’émousse et les gouverneurs anglais reculent.

 

"Je n'aime pas le mot tolérance, mais je n'en trouve pas de meilleur "

 

Il cherche à obtenir une unité de son pays, que ce soit la fin du système des castes, en prenant fait et cause pour les exclus du pays considérés comme des moins que rien. C’est ainsi qu’en 1932, il entame une grève de la faim à mort contre l'intouchabilité, "une tache honteuse" et obtient sa suppression dans leur mise à l’écart de la société… dans la loi en tout cas car les mentalités mettront beaucoup plus de temps à évoluer. Que ce soit aussi du point de vue des minorités. Il se heurte aussi aux rivalités ethniques et religieuses notamment avec Ali Jinnah qui représente les musulmans du pays inquiets de leurs droits face à une majorité hindouiste tentée par la violence.

 

Pendant la 2nde guerre mondiale, il annonce que  l'Inde ne peut pas participer à une guerre ayant pour but la liberté démocratique, alors que cette liberté lui est refusée et lance la campagne « Quit India » intensifiant les demandes d’indépendance. Il est encore jeté en prison mais les britanniques prennent conscience que l’indépendance est devenue inéluctable.
                                                                                                                         Jinnah et Gandhi

Préparée par le dernier vice-roi des Indes, Lord Mountbatten, l’indépendance se heurte vite au morcellement du pays. Notamment les revendications d’Ali Jinnah et des musulmans qui réclament un état indépendant. Les violences intercommunautaires éclatent et des populations commencent à être expulsées de chez elles pour « homogéneiser » ethniquement ou religieusement certaines provinces. Malgré les appels à la paix de Gandhi, la partition du pays entre régions musulmanes et hindouistes s’avère la seule solution.

Le 15 août 47, l’indépendance et la partition entre Inde et Pakistan est proclamée.


Aussitôt éclatent des affrontements et un exode des populations qui se prolonge en une terrible guerre civile où les victimes seraient entre un et deux millions. Gandhi tente d’arrêter le massacre en menaçant de jeûner à mort.


Il est assassiné en janvier 48 par Nathuram Godse,
un hindouiste qui lui reproche ses appels à la paix envers les « ennemis musulmans ». Sa mort est un choc international et ses obsèques dirigées par Nehru qui s’affirme comme son successeur,  seront suivies par 2 millions de personnes.

Après des années de lutte pour l’indépendance il est victime des vieilles rivalités au sein même de son pays une fois le colonisateur parti.  Des démons qui toucheront tant de pays nouvellement décolonisés…


Gandhi sera un inspirateur pour de nombreuses autres figures de la lutte progressiste tels que le Dalaï Lama au Tibet, Nelson Mandela en Afrique du Sud ou Martin Luther King qui conservait un portrait de Gandhi dans son bureau.

 

 "Quelle différence cela fait-il aux morts, aux orphelins et aux sans-abri, que la destruction aveugle ait été amenée au nom du totalitarisme ou au nom sacré de la liberté et de la démocratie ? "

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